Face à la poussée de l’extrême droite, Londres durcit radicalement sa politique d’asile


Face à la poussée de l’extrême droite, Londres durcit radicalement sa politique d’asile
Une onde de choc pour l’Europe du Nord. Le gouvernement de Keir Starmer s’apprête à présenter une réforme migratoire parmi les plus restrictives de l’histoire récente du Royaume-Uni. Entre tensions sociales, montée de l’extrême droite et pressions européennes, Londres revoit profondément sa politique d’asile. Un virage qui pourrait redessiner les routes migratoires en Europe du Nord et avoir des conséquences directes pour la Belgique.
Le gouvernement de Keir Starmer prépare une refonte majeure de son système d’asile dans un climat politique particulièrement instable. Les traversées illégales de la Manche continuent d’augmenter, dépassant déjà les chiffres de 2024, tandis que Reform UK, le parti de Nigel Farage, s’installe durablement devant les travaillistes dans plusieurs sondages.
Dans ce contexte, la ministre de l’Intérieur, Shabana Mahmood, a affirmé que l’immigration clandestine est en train de « déchirer le pays », une déclaration inhabituelle pour une responsable travailliste.
Londres opère un virage inédit sur l’asile
Le plan que Shabana Mahmood présentera ce lundi 17 novembre 2025 au Parlement marque un changement d’orientation profond. Les personnes reconnues réfugiées devraient désormais attendre 20 ans avant de pouvoir prétendre à l’installation permanente, contre 5 ans jusqu’à présent.
Les personnes reconnues réfugiées devraient désormais attendre 20 ans avant de pouvoir prétendre à l’installation permanente, contre 5 ans jusqu’à présent.
Leur statut sera réexaminé régulièrement, ce qui pourrait conduire au retour forcé de ceux dont le pays d’origine serait ensuite jugé sûr. La durée initiale de protection serait réduite à 30 mois et plusieurs aides sociales seraient retirées aux demandeurs d’asile autorisés à travailler mais ne le faisant pas, ou condamnés pour certaines infractions.
Cette photographie montre des pancartes avec les photos du président français Emmanuel Macron (à gauche) et du Premier ministre britannique Keir Starmer (à droite) parmi des chaussures disposées sur la plage de Calais lors d’une action symbolique en hommage aux migrants morts en tentant de traverser la Manche, à Calais, dans le nord de la France, le 20 septembre 2025. (Sameer Al-DOUMY / AFP).
Rupture de la tradition britannique
Cette réforme rompt avec des décennies de tradition britannique d’accueil durable. Elle rapproche le Royaume-Uni du modèle danois, fondé sur une protection temporaire et potentiellement réversible. Un basculement doctrinal qui vise autant à dissuader les traversées qu’à répondre à la pression politique interne.
Ce durcissement intervient alors que les tensions s’accumulent : manifestations devant des hôtels hébergeant des demandeurs d’asile, mobilisation d’extrême droite ayant rassemblé jusqu’à 150 000 personnes à Londres en septembre 2025, et critiques répétées de Nigel Farage.
Ce durcissement intervient alors que les tensions s’accumulent : manifestations devant des hôtels hébergeant des demandeurs d’asile, mobilisation d’extrême droite ayant rassemblé jusqu’à 150 000 personnes à Londres en septembre 2025, et critiques répétées de Nigel Farage accusant le gouvernement Starmer de ne pas maîtriser ses frontières.
L’exécutif travailliste cherche ainsi à reprendre la main sur un dossier devenu explosif.
Une réforme scrutée en Europe, entre attentes et inquiétudes
Les réactions européennes montrent à quel point les décisions britanniques dépassent le cadre national. En France, le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, a expliqué ne pas être surpris par ce durcissement, rappelant que plusieurs partenaires européens souhaitaient depuis des mois que Londres rapproche ses standards d’accueil de ceux de l’Union européenne. L’objectif affiché par Paris est clair : réduire l’attractivité du Royaume-Uni pour les migrants présents dans la région de Calais.
Ce repositionnement britannique s’inscrit dans une dynamique plus large en Europe du Nord.
Ce repositionnement britannique s’inscrit dans une dynamique plus large en Europe du Nord. Les Pays-Bas discutent eux aussi de mesures restrictives, l’Allemagne accélère ses procédures de renvoi, et le Danemark applique depuis plusieurs années une politique de protection strictement temporaire. Même en dehors de l’Union, Londres reste un acteur structurant des flux migratoires dans la région.
La question centrale devient alors celle de l’effet réel de ce durcissement : réduira-t-il les traversées de la Manche, ou déplacera-t-il simplement les trajets vers d’autres pays européens jugés plus accessibles ? Les ONG craignent un simple report des flux, tandis que certains gouvernements espèrent une diminution de la pression sur leurs frontières.
Des abris de forune où logent les migrants à Calais dans l’attente de traverser la Manche pour un lendemain meilleur à Londres. D.R.
Un impact direct et indirect pour la Belgique
La Belgique n’est pas en première ligne des traversées vers le Royaume-Uni, mais elle pourrait ressentir les effets de cette réforme à plusieurs niveaux. En effet, si les conditions d’accueil outre-Manche deviennent nettement moins attractives, une partie des migrants présents en France ou en Belgique pourrait renoncer à tenter la traversée, ce qui réduirait l’activité des réseaux de passeurs autour de Zeebrugge et allégerait la pression dans les zones portuaires.
Ceux qui n’iront plus vers le Royaume-Uni pourraient se tourner vers d’autres systèmes d’asile européens, dont celui de la Belgique, déjà saturé depuis plusieurs années.
Mais un scénario inverse n’est pas exclu. Ceux qui n’iront plus vers le Royaume-Uni pourraient se tourner vers d’autres systèmes d’asile européens, dont celui de la Belgique, déjà saturé depuis plusieurs années. Les centres d’accueil belges sont sous constante pression judiciaire, et la question de l’hébergement des demandeurs d’asile demeure l’un des dossiers les plus sensibles de la politique fédérale.
La Belgique pourrait suivre le chemin tracé par Londres
Politiquement, le durcissement britannique pourrait alimenter le débat en Belgique. Certains partis pourraient présenter Londres comme un modèle à suivre, notamment sur la révision régulière du statut de réfugié ou sur l’allongement du délai d’accès à la résidence permanente.
À l’inverse, d’autres composantes politiques rappelleront que la protection internationale doit rester stable et prévisible.
Certains partis belges pourraient présenter Londres comme un modèle à suivre, notamment sur la révision régulière du statut de réfugié ou sur l’allongement du délai d’accès à la résidence permanente.
Le basculement britannique intervient au moment où l’Europe cherche un nouvel équilibre entre sécurité, humanité et attractivité. En transformant le statut de réfugié en protection temporaire réversible, Londres ouvre un chapitre qui pourrait, dans les mois à venir, reconfigurer les flux autour de la Manche et relancer la discussion européenne sur l’harmonisation des politiques d’asile.
Les décisions annoncées cette semaine à Westminster seront suivies de près à Bruxelles, comme dans toutes les capitales concernées par les routes migratoires du nord de l’Europe.
Alexander Seale (à Londres)
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Source: LPOST

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