L’Eglise anglicane d’Angleterre nomme pour la première fois une femme à sa tête : Sarah Mullally
La nouvelle archevêque désignée de Canterbury, Sarah Mullally, pose pour une photo dans la chapelle Corona de la cathédrale de Canterbury, dans le sud-est de l’Angleterre, le 3 octobre 2025, après l’annonce de sa nomination. Ben STANSALL / AFPC’est un moment historique : pour la première fois en près de cinq siècles, l’archevêché de Cantorbéry sera dirigé par une femme. Dame Sarah Mullally, 63 ans, ancienne infirmière et sage-femme devenue évêque de Londres, a été désignée pour succéder à Justin Welby. Elle a adressé ses premiers mots à « tous les peuples du Moyen-Orient, y compris nos frères et sœurs palestiniens », mais aussi l’Ukraine, la Russie, la Birmanie et la République démocratique du Congo. Sarah Mullally n’a pas éludé les zones d’ombre de son institution en évoquant les récents rapports sur la protection des mineurs et des personnes vulnérables. Elle est également revenue sur son parcours.
Sa nomination intervient après une année de vacance, marquée par la démission de Justin Welby, critiqué pour son incapacité à signaler un abuseur en série. Dans ce contexte, l’arrivée de Sarah Mullally ressemble à une tentative de renaissance pour une Église anglicane ébranlée par les scandales et en perte de fidèles.
Elle devient ainsi la 106ème personne à occuper ce poste, et la première femme.
Un rôle spirituel mais aussi politique
L’archevêque de Cantorbéry est le chef spirituel de la Communion anglicane mondiale, qui compte environ 85 millions de fidèles. Mais le rôle ne se limite pas à la sphère religieuse : il s’agit aussi d’une fonction publique de premier plan. Mullally siègera désormais à la Chambre des Lords du Parlement britannique, où elle participera à des débats et interviendra sur des sujets d’importance nationale, notamment la liberté religieuse et les questions éthiques.
Elle devient ainsi la 106ème personne à occuper ce poste, et la première femme. La date de son intronisation n’est pas encore fixée, mais ses premiers mots, marqués par l’attentat antisémite de Manchester, ont déjà donné le ton : solidarité, compassion et espérance.
Quand l’espérance éclaire l’incertitude
Dans sa première adresse, Mullally a insisté sur l’« incertitude mondiale profonde » qui traverse nos sociétés : guerres, pauvreté, crise climatique. Elle a déclaré aspirer à une même espérance pour « tous ceux pris dans la guerre, ceux vivant dans l’extrême pauvreté et ceux confrontés à l’aggravation de la crise climatique ».
Que Dieu apporte l’espérance à ceux qui vivent dans le désespoir.
Elle a cité « tous les peuples du Moyen-Orient, y compris nos frères et sœurs palestiniens », mais aussi l’Ukraine, la Russie, la Birmanie et la République démocratique du Congo. « La guérison passe par des actes de bonté et d’amour », a-t-elle déclaré. « Que Dieu apporte l’espérance à ceux qui vivent dans le désespoir », a-t-elle lancé.
Prendre position sur les grands débats de société
Mullally a également souligné que la société britannique est confrontée à des « questions morales et politiques complexes ». Elle a mentionné le droit des personnes en fin de vie à choisir leur mort, la réponse à apporter aux réfugiés fuyant la guerre et les pressions subies par des communautés « négligées et sous-évaluées ».
La haine et le racisme, sous toutes leurs formes, ne doivent pas être autorisés à nous déchirer.
Revenant sur l’attentat de Manchester, elle a dénoncé la montée de la haine « qui surgit des fractures au sein de nos communautés ». Pour elle, l’Église a le devoir de se tenir aux côtés de la communauté juive face à l’antisémitisme : « La haine et le racisme, sous toutes leurs formes, ne doivent pas être autorisés à nous déchirer ».
Un engagement pour les survivants d’abus
La nouvelle archevêque n’a pas éludé les zones d’ombre de son institution. Elle a évoqué les récents rapports sur la protection des mineurs et des personnes vulnérables, reconnaissant. « En tant qu’Église, nous avons trop souvent échoué à prendre au sérieux les abus de pouvoir sous toutes leurs formes », a-t-elle reconnu.
Elle s’est engagée à écouter les survivants et à poursuivre la transformation culturelle amorcée en matière de sauvegarde. « Cela ne sera pas facile », a-t-elle admis, « mais nous devons tous accepter que la lumière soit faite sur nos actions, quel que soit notre rôle au sein de l’Église ».
En tant qu’Église, nous avons trop souvent échoué à prendre au sérieux les abus de pouvoir sous toutes leurs formes.
La nomination de Sarah Mullally a immédiatement suscité des réactions politiques. Le Premier ministre Keir Starmer lui a adressé ses félicitations, affirmant qu’elle jouera « un rôle clé dans notre vie nationale » et qu’elle incarne « une Église qui cherche à rassembler ».
Une pionnière dans son parcours
Dame Sarah Mullally a souvent ouvert la voie. En 1999, elle devient la plus jeune directrice des services infirmiers en Angleterre. En 2018, elle est nommée évêque de Londres — le troisième poste le plus élevé de l’Église — devenant la première femme à l’occuper.
Mais son parcours ne s’est pas fait sans résistances. Les femmes ne sont prêtres dans l’Église d’Angleterre que depuis 1994, et certains évêques demeurent ouvertement opposés à leur présence dans le clergé, a fortiori à leur accession à la tête de l’institution.
Je sais que ce que nous proposons n’est pas allé assez loin pour certains, et trop loin pour d’autres.
Mullally a présidé en 2023 un groupe de travail sur le mariage homosexuel. La décision d’autoriser la bénédiction des couples de même sexe fut pour elle « un moment d’espérance pour l’Église », mais elle a reconnu que le compromis restait fragile : « Je sais que ce que nous proposons n’est pas allé assez loin pour certains, et trop loin pour d’autres ».
Ces divisions continueront de marquer son mandat, tout comme les défis de la sécularisation et la perte de confiance liée aux scandales.
Une mission lourde de symboles
La loi oblige l’archevêque de Cantorbéry à prendre sa retraite à 70 ans. Certains pensaient donc que Mullally, âgée de 63 ans, ne serait pas choisie. C’est pourtant elle qui entre dans l’histoire.
Dans son communiqué, elle a insisté sur la vocation qui la guide depuis son adolescence.
À chaque étape de mon chemin, dans les soins infirmiers comme dans le ministère chrétien, j’ai appris à écouter profondément — les personnes, mais aussi le murmure de Dieu — et à chercher à rassembler pour trouver espérance et guérison.
« À chaque étape de mon chemin, dans les soins infirmiers comme dans le ministère chrétien, j’ai appris à écouter profondément — les personnes, mais aussi le murmure de Dieu — et à chercher à rassembler pour trouver espérance et guérison », dit-elle.
Pour elle, servir l’Église demeure un « profond privilège », porté par la conviction que Dieu l’accompagnera, « comme il l’a toujours fait ». Avec Sarah Mullally, l’Église d’Angleterre entre dans une nouvelle ère. Entre tradition et modernité, défis spirituels et débats sociétaux, elle incarne à la fois le symbole d’une histoire bouleversée et la promesse d’un futur où l’écoute, la justice et l’espérance retrouveront leur place au cœur de la foi.
Alexander Seale (au Royaume-Uni)
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Source: LPOST
