Secouée par une crise financière sans précédent, l’ONU lance un plan de restructuration qui va pénaliser ses actions


Secouée par une crise financière sans précédent, l’ONU lance un plan de restructuration qui va pénaliser ses actions
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, se dirige vers le pupitre pour tenir une conférence de presse.A la veille de l’ouverture de la semaine de haut niveau de l’Assemblée générale de l’ONU qui se déroulera du 22 au 29 septembre 2025 à New York, le secrétaire général de l’organisation, António Guterres a confirmé, le 18 septembre, ce qui ressemble à un tournant historique : un plan d’austérité massif pour l’ONU. Pour la première fois depuis sa création en 1945, l’organisation va réduire son budget ordinaire de 15 % dès 2026, supprimer près de 2.700 postes et relocaliser une partie de ses bureaux hors de New York et de Genève. Mais le choc le plus brutal sera humanitaire : l’aide mondiale passera de 44 milliards de dollars en 2025 à 29 milliards en 2026, amputant l’assistance à des dizaines de millions de personnes.
Des chiffres implacables
En 2026, le budget ordinaire de l’ONU sera fixé à 3,238 milliards de dollars, contre 3,7 milliards en 2025. Ce qui confirme la décision des dirigeants de l’organisation internationale à lancer un véritable plan d’austérité. Il est question de la suppression de 2 681 à 2 700 emplois, soit environ 20% des effectifs du Secrétariat.
Le plan humanitaire mondial sera également frappé de plein fouet. Ses ressources, évaluées à 44 milliards en 2025, tomberont à 29 milliards en 2026 (-40%). Conséquence directe : seuls 114 millions de bénéficiaires recevront une aide, contre 180 millions cette année.
Le plan humanitaire mondial sera également frappé de plein fouet. Ses ressources, évaluées à 44 milliards en 2025, tomberont à 29 milliards en 2026.
Sur le terrain, les coupes sombres ont déjà des conséquences directes : 400 centres de soins ont fermé en Afghanistan, la lutte contre la tuberculose a été suspendue au Bangladesh, et le Programme alimentaire mondial a vu ses financements chuter de 40%. Le Bureau humanitaire des Nations unies prévient : « Des millions de personnes vont mourir » en raison de la situation financière de l’ONU.
Les raisons des problèmes financiers de l’ONU
La crise trouve son origine dans les arriérés de paiement qui paralysent les finances de l’ONU. Fin avril 2025, l’organisation faisait face à un trou de 2,4 milliards de dollars. En cause : les États-Unis, premiers contributeurs (22% du budget ordinaire), qui n’ont plus versé un seul dollar depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier 2025. L’arriéré américain atteint déjà 1,5 milliard de dollars.
La Chine, deuxième contributeur, paie ses cotisations au compte-goutte. En décembre 2024, elle n’avait réglé qu’en toute fin d’année ses 597 millions de dollars dus. Pékin retarde aussi volontairement les financements aux ONG, bloquant près d’un quart des dossiers en 2024 au nom de « non-conformités politiques ».
La crise trouve son origine dans les arriérés de paiement qui paralysent les finances de l’ONU. Fin avril 2025, l’organisation faisait face à un trou de 2,4 milliards de dollars.
La Russie reste le maître de l’obstruction au Conseil de sécurité, multipliant les blocages sur l’Ukraine et la Syrie, tandis que l’Inde milite pour un monde multipolaire qui sert avant tout ses ambitions régionales. Résultat : une ONU asphyxiée, utilisée comme levier politique par les grandes puissances au lieu d’être soutenue comme forum universel du multilatéralisme.
Et l’Europe dans tout ça ?
L’Union européenne et ses États membres sont collectivement les premiers bailleurs mondiaux de l’aide humanitaire, représentant plus de 50% des financements internationaux. Mais leur contribution au budget ordinaire de l’ONU reste limitée (environ 25%, répartis entre l’Allemagne 5,7%, la France 3,9%, l’Italie 2,8%, l’Espagne 1,9%, la Belgique 0,8%).
Cette disproportion affaiblit la capacité de l’Europe à compenser le retrait américain. Elle pose aussi une question stratégique : l’UE peut-elle incarner le « dernier défenseur du multilatéralisme » alors que ses propres moyens restent contraints et que sa gouvernance empêche souvent une voix unique en politique étrangère ?
L’Union européenne et ses États membres sont collectivement les premiers bailleurs mondiaux de l’aide humanitaire, représentant plus de 50% des financements internationaux. Mais leur contribution au budget ordinaire de l’ONU reste limitée à environ 25%.
À Bruxelles, la Commission européenne plaide pour un « sursaut collectif » afin d’éviter un effondrement humanitaire. À Paris, la diplomatie française insiste sur la préservation du Conseil de sécurité comme forum de résolution des crises, malgré l’obstruction croissante de Moscou et Pékin. À Berlin, l’Allemagne – qui ambitionne un siège permanent au Conseil de sécurité – voit dans cette crise une opportunité de pousser une réforme du financement de l’ONU. Quant aux pays nordiques, grands contributeurs volontaires aux agences humanitaires, ils redoutent un « effet domino » où leurs financements bilatéraux seraient absorbés pour combler les trous du multilatéral.
Conséquences sécuritaires en Afrique
Les coupes budgétaires menacent directement les opérations de maintien de la paix en Afrique. Au Mali, en République centrafricaine et en République Démocratique du Congo (RDC), les contingents européens dépendent du soutien logistique, du renseignement et de la médiation politique des missions onusiennes. Leur affaiblissement compliquerait les efforts européens et risquerait d’alimenter l’instabilité régionale, les flux migratoires et les menaces terroristes.
Nous ne pouvons pas sauver des vies avec des promesses. Faute d’un engagement renouvelé des États-Unis, de la Chine et d’une Europe plus cohérente, l’ONU risque de se transformer en un simple forum diplomatique, dépourvu de moyens réels d’action.
Le paradoxe est cruel : en 2025, le monde compte 120 conflits armés recensés, contre 30 il y a 30 ans. Jamais l’ONU n’a disposé d’aussi peu de moyens face à un environnement aussi violent. Pour l’Europe, le risque est double : un voisinage immédiat (Ukraine, Caucase, Méditerranée) fragilisé sans filet multilatéral, et une perte d’influence stratégique au profit de puissances régionales affirmées.
Perspectives
L’adoption du budget 2026 par l’Assemblée générale est attendue pour décembre 2025. Si le plan est confirmé, les suppressions de postes et relocalisations de bureaux interviendront progressivement en 2026 et 2027.
Au-delà, une réforme structurelle du financement des Nations unies sera inévitable si les retards de paiement persistent. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, l’a rappelé sans détour : « Nous ne pouvons pas sauver des vies avec des promesses. Faute d’un engagement renouvelé des États-Unis, de la Chine et d’une Europe plus cohérente, l’ONU risque de se transformer en un simple forum diplomatique, dépourvu de moyens réels d’action ».
Hamid Chriet
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Source: LPOST

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