Le sens de faire la fête à la Wallonie
Christine Mahy, Secrétaire Générale du RWLP. BELGACe week-end, la Wallonie est fête. Mais une fête n’a pas de sens si elle délaisse le collectif au profit de l’ivresse éphémère de quelques-uns, il en va de même pour le futur de la Wallonie et les prochains choix du gouvernement wallon. Comme chaque année à la même époque, l’heure est « aux Wallos ». Un marronnier pour les médias, un repère pour les fêtards, un immanquable pour les politiques. Le rendez-vous garantit la bonhomie du folklore, la tradition de la liesse populaire, les sorties en tenues d’apparat et la célébration des institutions régionales.
Pour le Réseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP), associé de près aux festivités par les comités de quartier et les porteurs de dynamiques sociales namurois, la fête est pleine et entière quand elle revigore, quand elle donne de la force à la solidarité, au combat contre les inégalités.
Nous ne pourrons écarter des réjouissances l’inquiétude par rapport au sort réservé à la population wallonne, (…) la plus appauvrie.
Ainsi, faire la fête à la Wallonie dans les prochains jours ne devrait pas noyer sous les confettis la réalité de vie d’un nombre croissant de wallonnes et de wallons. Faire la fête à la Wallonie ne peut s’entendre qu’en renforçant l’engagement pour une société juste et solidaire. Depuis de nombreuses années, l’associatif namurois à caractère social occupe ainsi les fêtes de Wallonie, avec joie, et donne à la fête tout son sens. Le RWLP s’y associe.
Cette année, nous ne pourrons écarter des réjouissances l’inquiétude par rapport au sort réservé à la population wallonne, singulièrement la plus appauvrie. Un principe a le vent en poupe et semble commun aux décisions politiques actuelles : la diminution des mécanismes de solidarité, le rétrécissement des droits pour toutes et tous.
Comment, dans ce contexte, le gouvernement wallon va-t-il envisager l’avenir de la Wallonie dans le conclave budgétaire qui s’annonce ? A quoi l’argent du collectif va-t-il être utilisé ? Au bénéfice de qui ? Le Réseau est bien conscient qu’un équilibre budgétaire doit être trouvé, que cette élaboration doit être envisagée avec sérieux, qu’elle n’est pas simple.
Cependant, le RWLP insiste : comme une fête n’a pas de sens si elle délaisse le collectif au profit de l’ivresse éphémère de quelques-uns, il en va de même pour le futur de la Wallonie et les prochains choix du gouvernement wallon. Pourtant jusqu’ici, ce n’est pas la joie et les obstacles se multiplient ! Prenons trois exemples parmi les trouble-fêtes.
Une récente mesure prise en Wallonie : la réduction des droits d’enregistrement à 3 % semble déplacer une partie de la demande de la location vers l’achat. Cependant, le déséquilibre entre l’offre et la demande continue d’exercer une « pression haussière sur les loyers », avec + 6,2 % en Wallonie (entre 2024 et 2025) et un loyer moyen de 879 € pour les nouveaux contrats. La décision wallonne avantage les ménages les plus stabilisés ou très aisés sans résoudre la crise endémique du locatif.
Le Réseau nourrit une immense crainte pour les chômeurs en voie d’exclusion concomitante avec la déstructuration de l’emploi en Wallonie.
Une mesure au rang des possibles, entendue de la bouche de certains politiques wallons : des économies sur l’enveloppe des allocations familiales et la perspective de ne plus les octroyer au-delà du 3ème enfant.
Pour le RWLP, envisager des économies de la sorte, c’est prendre le sujet par le bout le plus inacceptable : le nombre d’enfants, et risquer de léser les jeunes les plus en difficultés. Alors que ces derniers devraient au contraire être soutenus par tous les moyens possibles pour leur permettre de trouver leur chemin, d’envisager leur vie d’adulte avec sérénité.
Ici aussi, comme dans le point précédent relatif à la fiscalité immobilière, le RWLP s’inquiète de la porte d’entrée choisie pour réformer. Si le Réseau devait demander une réforme des allocations familiales, ce serait en tout cas, davantage encore, au profit de la réduction de la pauvreté et des inégalités.
Une interrogation sur la politique de l’emploi en Wallonie. Le Réseau nourrit une immense crainte pour les chômeurs en voie d’exclusion concomitante avec la déstructuration de l’emploi en Wallonie.
Quelle va être la politique régionale de création d’emplois ? Alors que les garanties d’un travail de qualité, stable et rémunéré à sa juste valeur s’éloignent pour beaucoup et ce dans l’ensemble des secteurs (public, associatif, privé). Alors qu’aller travailler ne garantit plus la sortie de la pauvreté. Les craintes sont vives face à la tendance soutenue par les mesures gouvernementales qui font apparaître encore plus d’obstacles : dégradation des conditions de travail, flexibilisation des contrats, difficultés de combiner vies familiale et professionnelle, etc. De plus, la caisse commune est lourdement affaiblie par la défiscalisation des flexi-jobs, du travail étudiant, des heures supplémentaires, ce qui aggrave les risques pour les politiques sociales et le financement de la Sécurité sociale.
Le RWLP est convaincu que l’emploi est essentiel : aller travailler, c’est prendre part, donner son temps et sa force pour l’organisation de notre vie en société. Et ça se respecte ! Il le défendra avec d’autres à Namur, ce 24 septembre, au travers d’une grande marche pour l’emploi.
Logements, allocations familiales, emploi…, le RWLP n’est pas contre toutes les réformes wallonnes, dogmatiquement. Par contre, il montre de l’intransigeance : pour que toute politique soit pensée en fonction de la lutte contre les inégalités, pour que les personnes déjà affaiblies ne soient pas accablées – au contraire- , pour que les conséquences systémiques soient affrontées.
Le Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté (RWLP)
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Source: LPOST
