Expo en art majeur : La liberté de tons de Nadine Dewit
SPA. C’est dans un des plus beaux et verdoyants écrins des giboyeuses Ardennes belges, au cœur de la charmante cité de Spa, station thermale à la renommée internationale, jadis prisée par l’aristocratie mondiale comme par l’intelligentsia européenne, que Nadine Dewit, artiste dont on a déjà vanté méritoirement l’extraordinaire talent pictural, expose jusqu’au 31 août, quelques-uns de ses derniers et meilleurs tableaux. Le vernissage officiel aura toutefois lieu ce samedi 2 août, de 17h à 20h. L’entrée, accueillante pour toutes et tous, y est libre !
Le lieu de cette importante rétrospective n’est, du reste, pas moins magnifique, éclairé par un puits de lumière émanant d’une vaste verrière à l’architecture savamment aérée. C’est dans l’historique et spacieuse galerie d’art « Prince de Condé », située en plein centre ville, en face de la source de ces fameuses eaux de Spa, site appelé « Pouhon Pierre le Grand », à deux pas du non moins célèbre casino, à côté duquel se tient par ailleurs, jusqu’au 17 août, dans la salle du Centre Culturel, le prestigieux « Festival Royal de Théâtre » que l’artiste Nadine Dewit donne à voir son talent. La concomitance entre ces deux événements culturels majeurs, pour la cité spadoise, devrait donc y drainer un public cultivé, agréable et intéressé par l’art en sa plus haute et noble expression.
Deux sources majeures d’inspiration artistique : l’impressionnisme et l’expressionnisme
Quant au titre, « Impressions – Expressions », de cette exposition picturale qui s’annonce donc passionnante, très élégante dans sa conception et mise en place, elle ne laisse planer aucun doute sur les principales sources d’inspiration de Nadine Dewit : l’impressionnisme et l’expressionnisme, deux des principaux courants artistiques au sein des XIXème et XXème siècles !
L’impressionnisme, tout d’abord, chronologiquement. C’est à son représentant resté le plus célèbre en la matière, Claude Monet, dont les superbes nymphéas, notamment, ont laissé une trace indélébile dans l’histoire de l’art, que Nadine Dewit reconduit, avec un talent inégalé par-delà l’originalité de son propre traitement pictural, tant sur le plan chromatique que formel, en première instance.
Un art en majesté, ainsi qu’en témoigne au plus haut degré sa série de « Marines », ensemble particulièrement chic dans son très raffiné camaïeu de gris !
Ainsi, ce qui, chez le connaisseur averti comme chez le spectateur profane, frappe en premier lieu dans les non moins splendides « Nymphéas », toiles d’assez grandes dimensions, de Nadine Dewit, nymphéas que l’on pourra donc admirer tout à loisir dans cette belle exposition spadoise de la galerie « Prince de Condé », c’est, à n’en pas douter, l’art sûr et consommé de leurs très riches coloris, délicatement chatoyants, bien qu’un subtil mélange de turquoises et d’émeraudes y domine dans la vue d’ensemble : une palette tout en finesse et nuances, dans ses nombreuses mais infimes variations chromatiques, par-delà même son indéniable force interprétative !
L’œil et l’esprit : une fascinante synthèse artistique
Car c’est bien là ce qui, dans ces nymphéas dewitiens, ne laisse de surprendre, tant l’œil que l’esprit, celui qui, émerveillé, les contemple. Une impalpable intensité, pour employer ici un oxymore de circonstance, dont l’impression visuelle, sinon sensuelle, se voit indéfiniment renforcée, tantôt approfondie et tantôt rehaussée, par l’impact émotionnel, physique et mental, que procure forcément son expression formelle et, davantage encore, sa portée spirituelle (plus encore que simplement intellectuelle), voire son sens philosophique ou même métaphysique.
D’où précisément, et pour boucler ici la boucle en toute cohérence, cette indéfinissable et pourtant très réelle, concrète et tangible, synthèse artistique entre l’impressionnisme et l’expressionnisme : un style qui, identifiable entre tous, n’appartient donc effectivement là, par son originalité, qu’à l’immense talent pictural, fascinant à plus d’un titre, de Nadine Dewit !
Un imaginaire fauve
Car, d’un point de vue stylistique, mais aussi sur le plan purement esthétique, c’est bien donc aussi l’expressionnisme, courant artistique majeur de la première moitié du XXème siècle, avec des peintres aussi novateurs, par-delà leur prodigieux talent, qu’Emil Nolde, Vassily Kandinsky, Ernst Ludwig Kirchner, August Macke, Franz Marc ou même Egon Schiele, qui caractérise le mieux, certes actualisé ici au regard de la sensibilité du XXIe siècle, l’imaginaire artistique de Nadine Dewit.
L’expressionnisme, mais aussi, dans la chaleureuse couleur des tons acidulés (du jaune au rouge, en passant par l’orange et l’amarante) qu’elle emploie dans la magnificence de ses toiles, un non moins subtil, mais tout aussi intense, rapport au fauvisme, dont l’inspiration première remonte à des peintres tels que Matisse, Derain, Van Dongen, Vlaminck, Gauguin, Van Gogh, ou les nabis Bonnard et Vuillard, voire Odilon Redon, sans oublier, mâtiné de cubisme, l’immense Cézanne !
Une influence artistique quintessentielle : l’abstraction lyrique de Nicolas de Staël
Un autre artiste majeur a toutefois inspiré ici, de manière prépondérante et telle sa plus importante référence, l’ultime série de tableaux de Nadine Dewit : Nicolas de Staël, comme si le minimalisme géométrique de son formalisme pictural s’avérait aussi, en définitive et paradoxalement, l’aboutissement le plus réussi et accompli à la fois, de son art. Un art en majesté, ainsi qu’en témoigne au plus haut degré sa série de « Marines », ensemble particulièrement chic dans son très raffiné camaïeu de gris !
Une artiste inclassable à force de classe !
Telle est notamment la raison pour laquelle Nadine Dewit, personnalité infiniment libre et refusant toute facile étiquette qui l’emprisonnerait dans un seul style ou la réduirait à une unique case, appauvrissant ainsi sa recherche artistique comme elle mutilerait son insatiable curiosité intellectuelle, privilégie comme technique, dans ses tableaux, l’acrylique, les pigments, les encres et parfois l’huile.
Quintessence de l’art : les sujets, thèmes et matières, que Nadine Dewit traite dans ses toiles y sont toujours développés, intimement liés tant dans la forme que dans le fond, à partir de trois grands courants au sein de l’art moderne et contemporain : l’impressionnisme, l’expressionnisme et l’abstraction, ainsi que j’en ai moi-même longuement disserté dans la belle monographie en couleurs, intitulée « Nadine Dewit : l’art sublime de la liberté et de l’engagement » (Editions Samsa, Bruxelles-Paris, 2023) que je lu ai consacrée, enrichie par ailleurs là, à propos de cette même Nadine Dewit encore et toujours, d’un élogieux texte, concis mais ciselé, où tout est dit, résumé de manière très précise, en une remarquable économie de mots en outre savamment pensés, du philosophe Pierre Somville, membre éminent de la vénérable Académie Royale de Belgique et, qui plus est en matière d’analyse artistique aussi bien que d’autorité morale ou crédibilité intellectuelle, dans la Classe des Arts justement !
Sublimité du « grand style » selon Nietzsche
Semblable synthèse artistique chez la flamboyante, à la fois humble et généreuse, personne de Nadine Dewit, gage d’un don aussi rare que précieux, prend indubitablement ici le sens, très personnel et quasiment inédit, d’un pari des plus audacieux, sinon vertigineux, et, pourtant, éminemment réussi, particulièrement bien accompli, en l’occurrence. Chapeau, l’artiste : inclassable à force de classe !
Davantage : cet immense penseur, poète à ses heures éperdues, que fut naguère Friedrich Nietzsche aurait très certainement pu dire aujourd’hui de Nadine Dewit, comme il le fit jadis en son très inspiré « Ainsi parlait Zarathoustra » pour définir le caractère sublime du « philosophe-artiste », que c’est bien là ce qu’il appelait encore, dans ces somptueuses pages, le « grand style » !
L’art de Nadine Dewit pétille dans la cité thermale
C’est dire si cet art, aussi fastueux qu’exquis, de Nadine Dewit pétille agréablement, en ces beaux jours d’été, dans l’enchanteresse et ravissante cité thermale de Spa ! Courez-y donc pour y savourer à pleines gorgées ces fabuleux tableaux qui rafraîchissent ainsi l’esprit tout autant que les sens…
Oui : une caresse pour l’âme et le corps ainsi, chose tellement rare, réunis l’éphémère et pourtant intemporel (l’oxymore est ici, plus que jamais, de circonstance) temps précieux de l’Art !
DANIEL SALVATORE SCHIFFER
Pratique:
Galerie Pierre Condé
Rue Gérardy – 4900 SPA
Exposition accessible du mercredi au dimanche, de 14h à 19h, en conviviale présence de l’artiste de surcroît. https://www.samsa.be/livre/nadine-dewit
Daniel D. Schiffer est philosophe, écrivain, auteur d’une quarantaine de livres (dont « Nadine Dewit – L’art sublime de la liberté et de l’engagement », monographie en couleurs parue, en 2023, aux Editions Samsa, Bruxelles-Paris), professeur d’esthétique et de philosophie de l’art à l’Institut Royal Supérieur d’Histoire de l’Art et d’Archéologie de Bruxelles (IRSHAAB).
L’article Expo en art majeur : La liberté de tons de Nadine Dewit est apparu en premier sur L-Post.
Source: LPOST