Europe : Bruxelles lève les freins administratifs pour doper la défense européenne


Europe : Bruxelles lève les freins administratifs pour doper la défense européenne
La Commission européenne a présenté, mardi 17 juin, le « paquet de simplification pour la défense », un ensemble de mesures destinées à lever les blocages bureaucratiques qui ralentissent la montée en puissance de l’industrie de défense sur le continent. Face à l’agression russe en Ukraine et aux incertitudes concernant l’engagement futur des États-Unis, Bruxelles propose notamment l’instauration d’un permis national « fast track » avec une réponse dans les 60 jours et la prise en compte de la « préparation militaire » dans les décisions de concurrence. Il est aussi question d’une guidance claire sur les critères ESG applicable au secteur, l’assouplissement des marchés publics et des transferts intra UE et l’activation d’un fonds massif d’investissements, jusqu’à 800 milliards d’euros via l’initiative Readiness 2030. Ce train de réformes vise à construire un véritable marché unique de la défense, à intensifier l’innovation technologique et à renforcer les capacités industrielles et stratégiques, tout particulièrement pour les acteurs belges du secteur. Ce plan pourrait doper la croissance des entreprises belges du secteur.
La Commission européenne propose un système national de permis accélérés : tout projet de défense bénéficiera d’un traitement prioritaire avec une décision prise dans les 60 jours, faute de quoi l’autorisation sera considérée comme acceptée.
Ce nouveau mécanisme vise notamment à casser des délais administratifs aujourd’hui jugés excessifs et à fluidifier le lancement de nouveaux sites ou lignes de production.
Ce nouveau mécanisme vise notamment à casser des délais administratifs aujourd’hui jugés excessifs et à fluidifier le lancement de nouveaux sites ou lignes de production. Actuellement, les délais peuvent prendre plusieurs années. Pour renforcer cette dynamique, un guichet unique national sera mis en place dans chaque État membre. Il permettra de centraliser toutes les demandes liées à la défense (installation, transfert, environnement…) dans une procédure simplifiée, offrant ainsi une interface unique entre industriels et autorités.
Ces mesures rejoignent la feuille de route stratégique Readiness 2030 (anciennement ReArm Europe), qui mobilise jusqu’à 800 milliards d’euros sur plusieurs années pour assurer une réelle préparation militaire européenne
Concurrence, marchés publics, transferts : penser « défense »
Le paquet réforme les règles de concurrence en introduisant la notion de « préparation militaire » comme critère positif dans les évaluations de fusions, acquisitions ou aides d’État. Cette reconnaissance valorise les actifs de défense et offre un signal positif aux entreprises actives dans le secteur.
Les technologies duale (civile + militaire) se voient également réglées avec attention, afin de ne pas pénaliser les innovations pouvant servir les deux sphères. La Commission européenne estime qu’une entreprise engagée dans la défense peut être jugée conforme aux critères ESG, dès lors qu’elle ne fabrique pas d’armes interdites (mines, chimiques).
Les technologies duale (civile + militaire) se voient également réglées avec attention, afin de ne pas pénaliser les innovations pouvant servir les deux sphères.
Les marchés publics seront simplifiés : les seuils de procédure seront relevés, les appels d’offres inciteront au groupement par au moins trois États et les transferts intra UE de composants essentiels seront facilités, réduisant les délais parfois étendus à 18 mois. L’objectif est clair : créer une chaîne d’approvisionnement européenne intégrée et résiliente.
Financements massifs : public, privé, durable
Le volet financier prévoit un fonds européen de jusqu’à 150 milliards d’euros en prêts bonifiés (via l’Union de l’Épargne, la BEI, les fonds de cohésion…), complété par un mécanisme national « budget flex » suspendant certaines règles budgétaires (Pacte de stabilité) pour libérer des marges financières jusqu’à 650 milliards d’euros sur quatre ans.
La défense est désormais « compatible avec les critères de durabilité », sauf pour les activités liées aux armes prohibées.
La Commission instaure une guidance ambitieuse. La défense est désormais « compatible avec les critères de durabilité », sauf pour les activités liées aux armes prohibées. Ce cadre vise à rassurer les investisseurs privés (VC, fonds ESG, banques) et à lever un frein majeur à la finance privée dans le secteur.
Par ailleurs, un financement supplémentaire de 1,5 milliard en garantie est en discussion, notamment pour des composants fabriqués en Europe, avec transfert de technologies ; un compromis entre États membres est en cours d’élaboration.

Un véhicule militaire blindé d’Arquus équipé d’une tourelle de John Cockerill.

Analyse en profondeur : vers un vrai marché unique
La guerre en Ukraine, qui entre bientôt dans sa quatrième année, et les signaux divergents de l’administration américaine (notamment sous Trump) ont poussé l’Europe à repenser sa dépendance sécuritaire. Bruxelles cherche désormais à se reposer sur ses propres forces, loin d’un « parapluie » extérieur.
Plusieurs propositions, notamment sur l’éligibilité des matériels non-européens et le vaste package financier, devront être validées par les États membres et le Parlement européen.
Les doutes demeurent quant à la capacité du plan à créer un véritable marché compétitif : historiquement éclaté, dominé par quelques acteurs, le marché de la défense peine à faire émerger une concurrence interne efficace. Les mesures de centralisation, d’achats groupés et d’unification des chaînes d’approvisionnement tentent de répondre à ces défis, avec des résultats attendus d’ici 2029 2030.
Plusieurs propositions, notamment sur l’éligibilité des matériels non-européens et le vaste package financier, devront être validées par les États membres et le Parlement européen, possiblement d’ici début 2026. Une discussion clé portera sur l’équilibre entre autonomie industrielle, partenariat OTAN et ouverture aux technologies étrangères.
L’enjeu belge : opportunité ou transition ?
Pour la Belgique, patrie d’acteurs industriels comme FN Browning, John Cockerill ou Safran Aero Boosters, le plan européen pourrait être une aubaine pour son industrie de la défense. L’ouverture rapide de lignes ou de sites de production est désormais envisageable en quelques mois. L’’accès au Safe Fund, à l’InvestEU et aux prêts bonifiés devient plus direct, avec des critères d’éligibilité plus réalistes.
Pour la Belgique, patrie d’acteurs industriels comme FN Browning, John Cockerill ou Safran Aero Boosters, le plan européen pourrait être une aubaine pour son industrie de la défense.
En matière de financement privé, les capitaux ESG et les VC (venture capital) pourraient affluer, augmentant les capacités de développement et de R&D des PME belges. Concernant la chaîne d’approvisionnement, les simplifications des transferts intra-UE ouvriront la voie à une intégration plus fluide dans des consortiums paneuropéens. L’inclusion dans les achats groupés permettra à la Belgique (et à son secteur de la défense) d’accroître sa visibilité et son influence dans les programmes européens.
Ce paquet de mesures constitue un tournant pour la défense européenne : simplification, finance, coopération, durabilité. Il constitue le pilier d’un arsenal stratégique pensé pour 2030. La balle est désormais dans le camp des États membres et du Parlement européen.
Hamid Chriet
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Source: LPOST

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