Gaza, le spectre de la destruction et de l’occupation par Israël


Gaza, le spectre de la destruction et de l’occupation par Israël
Une femme âgée est assise à l’intérieur d’un bâtiment endommagé par un bombardement israélien à Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, le 18 avril 2025. AFPLe début, ce lundi 19 mai 2025, de la nouvelle opération israélienne d’envergure dans Gaza témoigne de la part de Benjamin Netanyahou de sa volonté d’en finir avec le Hamas. Le Premier ministre israélien l’avait pronostiqué dès le début de la guerre. Depuis la riposte à l’attaque de l’organisation islamiste le 7 octobre 2023, l’armée israélienne et les membres du Hamas s’affrontent violemment, depuis bientôt 20 mois, sur le sol gazaoui et les premières victimes sont les Palestiniens. Coincés entre le marteau et l’enclume, ils ont été les victimes avant tout du Hamas puis de l’Etat hébreu. Au-delà de la situation intenable pour des millions de Gazaouis qui ont fui leurs maisons, le pire est à craindre pour les survivants. Cette guerre sans fin nourrit l’ego et étouffe la responsabilité d’un Netanyahou après le 7 octobre, qui avait promis en s’alliant à l’utra-droite israélienne d’apporter la sécurité aux Israéliens.
Israël a quitté Gaza en 2005 et seulement deux ans après, le territoire devenait une forteresse dirigée par le Hamas. Vingt ans de blocus israélo-égyptien et de nombreuses guerres plus tard ont plongé Gaza dans l’abîme où la haine et la violence s’auto-alimentent. Et la solution politique semble plus loin que jamais. En effet, depuis des mois et des mois, rien n’avance au cœur du processus de négociations pour parvenir enfin à un véritable acte politique mettant un terme aux combats à Gaza.
Les Gazaouis, victimes du Hamas et d’Israël
Le Hamas ne rend pas les armes et le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, surenchérit. Les deux parties jouent leur survie politique, au détriment de leurs populations. Aucune n’a en réalité intérêt à l’abandon du combat. Car quid après ? Netanyahou reprend sa lutte contre ses démêlés judiciaires et le Hamas bien affaibli se cherche un nouveau souffle politique, sans quoi il pourrait disparaître.
Pendant que le Qatar tente depuis 2023 de jouer le rôle de médiateur entre le Hamas et l’Etat hébreu pour stopper la guerre et ce, appuyé par les Américains, Israël joue un double jeu un peu difficile à suivre : parler d’un cessez-le-feu plus proche que jamais et engager une opération massive terrestre à Gaza pour « finir » le travail.
Pas de solution militaire
Il n’y a pas de solution militaire à cette histoire et personne ne veut de solution politique. On ne parle même plus de « processus de paix », ce concept vide de sens trimballé de chancellerie en chancellerie dans les années 2000.
On ne parle même plus d’Etat palestinien, de coexistence pacifique de deux Etats, d’arrêt de la colonisation, d’abandon par les Palestiniens de la violence islamiste pour défendre leur cause, etc.
Au fond plus personne ne comprend rien à ce qui se passe, car aucune des deux parties ne veut de la « paix » à ce stade et en l’état. Chaque société a peur et est victime de leaders inconséquents qui ont peur de la destruction.
Netanyahou lâché par sa population
Netanyahou est largement critiqué aujourd’hui en Israël par sa population, d’anciens dirigeants politiques, jusqu’au plus haut sommet de l’Etat. Les Gazaouis condamnent enfin le Hamas qui ne leur a apporté que le malheur mais n’ont aucune autre alternative politique viable, tant l’Autorité palestinienne est réduite quasiment au silence et à l’inaction depuis des années, même en Cisjordanie.
Le Hamas est comme une poule sans tête qui continue une politique de nuisance et totalement incohérente, et bien opposée à la volonté de préserver enfin la vie des Palestiniens.
Le Hamas est plus affaibli que jamais à Gaza et il le sait. Même s’il sait pouvoir compter sur le déclenchement de nouvelles vocations et recruter de nouveaux combattants dans un territoire exsangue, où près de 50 000 Palestiniens ont été tués depuis octobre 2023, il craint pour son avenir. Le groupe terroriste est comme une poule sans tête qui continue une politique de nuisance et totalement incohérente, et bien opposée à la volonté de préserver enfin la vie des Palestiniens. C’est pour cela qu’il ne répond pas à la condition majeure de Netanyahou pour stopper net la guerre : la libération des otages. C’est pour cela que l’opération actuelle a été décidée par le Premier ministre israélien.
Le Hamas n’a que faire au fond des Gazaouis, pourvu qu’il trouve une issue favorable pour s’en sortir.
Autorité palestinienne affaiblie
Les dirigeants israéliens demandent le désarmement du Hamas, tout en sachant que l’Autorité palestinienne, affaiblie par un Président Abbas en fin de course, n’est pas à même de prendre quelque relais que ce soit. Netanyahou, par la voie de ses porte-paroles, souhaite le départ de tous les gens du Hamas de Gaza. Mais pour aller où ? Le Qatar joue le rôle de médiateur, pas celui d’Arche de Noé pour un mouvement dont il ne raffole certainement pas.
Aucun pays arabe ne veut être déstabilisé, à commencer par l’Egypte et la Jordanie, en accueillant les dirigeants et les combattants du Hamas.
Dans le même temps, aucun pays arabe ne veut être déstabilisé, à commencer par l’Egypte et la Jordanie, en accueillant les dirigeants et les combattants du Hamas. Il ne reste donc que la mort ; la mort en martyr est de toute façon une partie constitutive du corpus idéologique qui les habite.
Du côté israélien, qui n’est jamais allé sur place, ne peut imaginer à la fois le climat de peur existentielle, et dans le même temps la forte résilience de toute une société qui a peur plus que jamais de l’extermination, après les attaques du 7 octobre 2023.
Radicalisation en Israël
Les Israéliens, désemparés et critiques de leur gouvernement et d’un Netanyahou qui n’a aucune stratégie d’avenir, se sont radicalisés vers l’extrême-droite pour espérer être protégés. Mais on voit bien que le pire pogrom qui a eu lieu contre des Juifs depuis des décennies a eu lieu en Israël, sous un gouvernement extrémiste comme jamais.
Dire que Israël veut l’extermination des Palestiniens n’a pas beaucoup de sens : les Israéliens veulent surtout vivre en paix mais ils devront un jour faire des concessions notamment en Cisjordanie et stopper la colonisation des territoires palestiniens ; les Palestiniens qui condamnent aujourd’hui enfin le Hamas, un peu tardivement, souhaitent aussi vivre en paix même si beaucoup aspirent encore à la destruction d’Israël.
Dire que Israël veut l’extermination des Palestiniens n’a pas beaucoup de sens : les Israéliens veulent surtout vivre en paix mais ils devront un jour faire des concessions.
Mais les uns comme les autres n’en ont cure de l’autre : ils s’acharnent contre l’adversaire par peur de disparaître. On voit difficilement une stratégie politique émerger dans les mois à venir pour finir la guerre, car il faut savoir terminer une guerre comme dit l’adage. En attendant, ce sont les Egyptiens, les Qataris, les Américains, qui faute de mesures multilatérales contraignantes et efficaces, s’échinent pour séparer les frères ennemis qui aujourd’hui se haïssent plus que jamais.
Sébastien BOUSSOIS
Docteur en sciences politiques, chercheur monde arabe et géopolitique, enseignant en relations internationales à l’IHECS (Bruxelles), associé au CNAM Paris (Equipe Sécurité Défense), à l’Institut d’Etudes de Géopolitique Appliquée (IEGA Paris), au NORDIC CENTER FOR CONFLICT TRANSFORMATION (NCCT Stockholm) et à l’Observatoire Géostratégique de Genève (Suisse).
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Source: LPOST

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