Secousse politique au Royaume-Uni : la montée fulgurante du parti d’extrême droite, Reform UK
Reform UK, le parti d’extrême droite du Brexiter, Nigel Farage, fait une percée politique lors des dernières élections locales du 1er mai. Les deux partis traditionnels britanniques sont ébranlés. AFPÀ Londres, ce jeudi 1er mai 2025, les électeurs anglais ont envoyé un message clair. À travers les résultats des élections locales dévoilés dès le lendemain matin, c’est tout l’édifice politique du Royaume-Uni qui semble vaciller. Le Parti conservateur s’effondre, le Parti travailliste vacille… et Reform UK, le parti d’extrême droite britannique emmené par Nigel Farage, leader du Brexit, surgit en force, redessinant un paysage politique longtemps verrouillé par le bipartisme. Il a ravi un siège parlementaire au Labour du Premier ministre Keir Starmer.
Un scrutin local, mais une onde de choc nationale
Il ne s’agissait « que » d’élections locales : renouvellement partiel des conseils municipaux, de six mairies dans l’ouest de l’Angleterre, et d’une élection partielle à Runcorn et Helsby, dans le Cheshire. Mais c’était aussi le premier test électoral depuis la victoire des Travailliste aux législatives de 2024. Et le résultat, tombé vendredi matin, à valeur de séisme.
Sur les quelque 1 650 sièges en jeu, répartis dans 24 conseils et autorités municipaux, les deux partis traditionnels sortent sérieusement ébranlés.
Sur les quelque 1 650 sièges en jeu, répartis dans 24 conseils et autorités municipaux, les deux partis traditionnels sortent sérieusement ébranlés. Les Conservateurs perdent 23 points, les Travaillistes en abandonnent 10 par rapport au scrutin équivalent de 2021. Un double décrochage qui a ouvert la voie à une percée spectaculaire : celle de Reform UK, emmené par le Brexiter Nigel Farage, qui s’installe désormais au cœur du jeu politique.
Le triomphe surprise d’un outsider devenu challenger
La progression de Reform UK n’a rien d’un épiphénomène. À North Tyneside, la mairie reste travailliste, mais le score du Labour s’effondre à 30 % (il y a 3 ans, le parti était crédité dede 53%). Juste derrière, Reform UK frôle la victoire avec 29 %, reléguant les conservateurs à une lointaine troisième place.
À Doncaster, à Peterborough ou encore dans le Grand Lincolnshire, même scénario : des électeurs déboussolés, en rupture avec les partis classiques, se rallient à la rhétorique offensive de Nigel Farage. Andrea Jenkyns, ancienne députée conservatrice passée dans son camp , s’adjuge la mairie du Lincolnshire. Une victoire symbolique, presque prophétique.
Le Brexit social refait surface
Au sein du Parti travailliste, la panique commence à se faire sentir. Peter Kyle, secrétaire à la Science, a beau affirmer qu’« une victoire reste une victoire », l’ambiance est morose. Reform UK séduit les classes populaires du Nord, bastion historique du Labour. Ce sont les mêmes territoires qui avaient massivement soutenu le Brexit.
C’est une fracture sociale et politique que les élites ont longtemps refusé de voir.
Une voix radicale s’impose, celle d’un électorat en colère : lassé des promesses trahies, indifférentes aux alternances de façade. « C’est une fracture sociale et politique que les élites ont longtemps refusé de voir », commente Tony Travers, politologue à la London School of Economics.
L’heure des comptes à gauche comme à droite
Chez les Conservateurs, c’est une hémorragie. Avec près de 1 000 sièges à défendre, le parti en perdrait plus de la moitié. Helen Whately, figure de l’aile dure, avait prévenu : « Nous allons prendre une raclée ». Elle ne croyait pas si bien dire.
Certains cadres conservateurs n’excluent plus une coalition avec Reform UK. Robert Jenrick s’y dit « favorable », tandis que la cheffe actuelle du parti, Kemi Badenoch, continue de rejeter tout rapprochement. Mais l’idée circule, et inquiète.
Le Labour doit changer de cap. Abandonner les coupes dans les prestations d’invalidité, renoncer aux hausses d’impôts pour les classes moyennes.
À gauche, les tensions internes éclatent au grand jour. Richard Burgon, ancien ministre fantôme sous Jeremy Corbyn, tire à boulets rouges sur la ligne actuelle :« Le Labour doit changer de cap. Abandonner les coupes dans les prestations d’invalidité, renoncer aux hausses d’impôts pour les classes moyennes ».
Le groupe Momentum appelle ses élus à faire front contre « l’austérité qui revient par la petite porte ».
Dans les rues de Londres, des manifestations d’agriculteurs et de retraités traduisent ce ras-le-bol généralisé. Le Labour n’a pas su capitaliser sur l’impopularité des Tories. Pire : il semble avoir perdu son âme.
Reform UK : une dynamique populiste assumée
Nigel Farage, leader du Reform UK, ne s’en cache pas : il veut capitaliser sur la colère. Avec un style à la Trump, des punchlines anti-immigration et anti -« woke », il sillonne le pays, transforme chaque meeting en show politique. Sa ligne est claire : « Le système est cassé. Nous sommes la seule alternative », serine-t-il.
Et l’électorat suit. Dans plusieurs régions, Reform UK dépasse les 25 %, devenant parfois la première force politique à certains endroits.
L’ancien trublion du Brexit n’est plus un perturbateur, mais un prétendant sérieux à l’exercice du pouvoir.
Un avertissement pour toute l’Europe ?
Ce qui se joue Outre-Manche dépasse les frontières britanniques. Le Royaume-Uni semble rejoindre la liste des démocraties occidentales fracturées, où le populisme progresse sur les décombres des partis traditionnels.
À l’image de la France ou des Pays-Bas, l’Angleterre de 2025 révèle une société en quête de rupture, de radicalité et, parfois, de revanche.
Dans les ruines fumantes du bipartisme, un autre pouvoir émerge : la colère.
Le Royaume-Uni ne tourne pas simplement une page politique. Il entre peut-être dans un nouveau chapitre démocratique — plus brutal, plus instable, et terriblement imprévisible. La question est de savoir si cette percée du parti de Nigel Farage va se poursuivre ou si elle est conjoncturelle…
Alexander Seale (à Londres)
L’article Secousse politique au Royaume-Uni : la montée fulgurante du parti d’extrême droite, Reform UK est apparu en premier sur L-Post.
Source: LPOST
