David Clarinval (MR) : « le gouvernement exige des clauses miroirs dans l’accord de libre-échange avec le Mercosur »
Pour le vice-Premier ministre et ministre notamment de l’Agriculture, la Belgique est favorable à la signature d’accords internationaux de libre-échange pour favoriser l’exportations, mais elle exigera des clauses miroirs pour éviter une concurrence déloyale au détriment des produits réalisés en Belgique. Concrètement, la Belgique refusera l’importation de produits traités avec des pesticides ou avec des hormones interdits en Europe ou en Belgique. Le discours de David Clarinval (MR) devrait contenter les agriculteurs belges. Par ailleurs, il précise que la Belgique n’est pas favorable à la règle européenne limitant le déficit d’un pays de l’Union à 3% du PIB, s’opposant ainsi à l’idée lance récemment par le président Emmanuel Macron. Découvrez la dernière partie de l’interview du vice-Premier ministre.
En tant que ministre de l’Agriculture, que pensez-vous de l’accord Mercosur qu’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne est allée signer fin 2024 avec les pays d’Amérique latine (Argentine, Brésil, Bolivie, Paraguay, Uruguay, Venezuela) ?
On sait que l’accord Mercosur comporte un volet positif et un volet négatif. Le volet positif, c’st pour l’économie belge et européenne parce que nos exportations vers ces pays vont pouvoir être améliorées ou favorisées. On pense notamment à des médicaments ou encore à des produits agroalimentaires. Par contre, nous avons beaucoup d’inquiétudes sur certains aspects de l’accord et c’est le volet négatif. Il est question ici du marché du secteur bovin. Clairement, l’objectif des pays du Mercosur est notamment de pouvoir nous vendre de la viande bovine.
Je suis donc dans une position un peu schizophrénique, car le ministre de l’Agriculture que je suis est un peu plus inquiet, alors qu’avec ma casquette de l’Economie, je me réjouis du boost pour nos exportations.
Je suis donc dans une position un peu schizophrénique, car le ministre de l’Agriculture que je suis est un peu plus inquiet, alors qu’avec ma casquette de l’Economie, je me réjouis du boost pour nos exportations. Mais l’accord de gouvernement est clair : nous sommes en faveur des accords de libre-échange et on veut continuer à pouvoir en signer dans le futur, mais ils doivent inclure des clauses miroirs. Concrètement, mes produits importés doivent être produits selon les mêmes normes sanitaires, phytosanitaires, de bien-être et environnementales que les produits fabriqués et commercialisés en Europe. C’est fondamental pour nous. Sans garantie de clauses miroirs, nous remettrons en cause ces accords.
Comment allez-vous faire maintenant que la présidente de la Commission européenne a signé ?
On ne sait pas encore exactement comment la Commission européenne va gérer le dossier. Il y a deux voies possibles de ratification de l’accord Mercosur, soit une ratification par chaque Etat, soit une ratification par le Parlement européen. C’est quand l’une de ces deux voies sera choisie qu’on saura si le débat va arriver à la Chambre ou pas. Mais dans tous les cas, le Gouvernement fédéral devra prendre attitude sur le dossier et notre position est assez claire.
Il faut des clauses miroirs suffisamment claires et fortes dans les accords de libre-échange pour protéger nos citoyens de produits qui seraient produits avec des normes inférieures à celles en vigueur chez nous.
Il faut des clauses miroirs suffisamment claires et fortes pour protéger nos citoyens de produits qui seraient produits avec des normes inférieures à celles en vigueur chez nous, notamment en matière d’utilisation de pesticides ou d’hormones.
BELGA
L’accord de libre-échange du Mercosur signé par Ursula von der Leyen reviendra sur le tapis et promet des débats houleux. (BELGA PHOTO ADRIAN BURTIN).
Il y a quelques jours, le Président français, Emmanuel Macron, s’est positionné en faveur de la révision de la règle européenne imposant aux Etats membres de limiter le déficit public à maximum 3% du PIB. Qu’en pensez-vous ?
Au niveau belge, nous avons décidé d’inscrire la Belgique dans la restauration d’une trajectoire budgétaire conforme à la ligne européenne. Donc nous sommes pour la mise en place d’un plan rigoureux de réduction du déficit pour le ramener à maximum 3% du PIB. Nous ne sommes donc pas favorables à l’abandon de cette règle.
Nous ne sommes donc pas favorables à l’abandon de la règle européenne obligeant les Etats membres à maintenir le déficit sous la barre des 3% du PIB.
Par contre, nous espérons obtenir des dérogations pour promouvoir les investissements dans le secteur de la défense où nous avons décidé de nous inscrire dans un plan allant vers les 2% du PIB investis dans la défense, voire même 2,5% à l’horizon 2034. Nous aimerions donc bénéficier, si c’est possible, de facilités au niveau européen pour pouvoir investir davantage, de manière plus rapide et plus forte, dans le secteur de la défense.
Que pensez-vous de la position de l’Europe qui est en train d’être mise de côté, notamment dans le règlement du conflit en Ukraine où les dirigeants européens ne sont pas invités autour de la table des négociations ?
D’abord, sur le plan économique, je pense qu’il est important que l’Europe se dote rapidement d’une stratégie. Sur le volet militaire et géopolitique, on voit effectivement que le président américain Donald Trump veut imposer, seul, une solution en face to face avec les Russes et c’est inquiétant de voir que les Ukrainiens et les Européens sont un peu laissés de côté. Cela montre que malheureusement l’Europe perd de sa force et de sa puissance.
C’est inquiétant de voir que les Ukrainiens et les Européens sont un peu laissés de côté. Cela montre que malheureusement l’Europe perd de sa force et de sa puissance.
Il est donc important que nous puissions, avec les partenaires européens, tant sur le plan économique que géopolitique, remettre en place des stratégies qui nous font reprendre notre place à tous les niveaux en termes de souveraineté, aussi économique, alimentaire, énergétique qu’en matière de défense.
Ne pensez-vous pas que les divisions entre les pays européens sur différents thèmes (immigration, économie, etc.) déforcent l’Europe et favorisent cette mise à l’écart ? Il n’y a qu’à voir la position de la Hongrie ou de la Pologne au sein de l’Union européenne…
Il est clair que les divisions actuelles ne sont pas rassurantes puisqu’elles empêchent les Etats membres de parler d’une seule voix. Il est temps pour les Européens de retrouver une cohésion pour contrer rapidement la stratégie qui se met en place sur la scène internationale.
Entretien : Philippe Lawson
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