Le Prix Nobel de la Paix 2023 décerné à Narges Mohammadi, militante emprisonnée en Iran pour 31 ans 


Le Prix Nobel de la Paix 2023 décerné à Narges Mohammadi, militante emprisonnée en Iran pour 31 ans 
Alors que l’Iran connaît depuis la mort de la jeune Mahsa Amini, un vent de fronde sans précédent de la part des femmes qui défient le pouvoir de Téhéran en refusant de porter le voile, le prix Nobel de la Paix a été décerné ce vendredi 6 octobre à la journaliste et militante des droits de l’homme Narges Mohammadi. Emprisonnée en Iran, elle menait, avant d’être arrêtée, un combat féroce pour la liberté et les droits de l’homme. Reste à voir si la distinction de la militante aura une quelconque pression sur le régime des Mollahs en Iran. Rien n’est moins sûr…
Ce vendredi 6 octobre, le Comité Nobel a voulu saluer le courage d’une femme dont le combat a eu un « coût personnel énorme » et qui purge une peine de 31 ans de prison en Iran assortie de 154 coups de fouet. Son mari a salué ce prix, depuis Paris où il est réfugié tout en ayant bien conscience qu’à ce stade, cette récompense, pour sa femme, ne changera rien à sa situation, tant que le régime restera celui-là et en l’état.
L’emblème de la soif de liberté
Cela fait un an que la jeune Mahsa Amini est décédée, et presque une semaine que la jeune Armita, d’origine kurde, hospitalisée à Téhéran après avoir été évacuée inconsciente du métro de la capitale, est dans le coma. De toute évidence agressée par des officiers de la police des mœurs, la fille de 16 ans a payé le prix de sa soif de liberté.
Ces deux femmes, comme des millions d’autres depuis des décennies, et plus encore depuis un an, se battent pour abandonner le voile et vivre librement dans leur pays. Narges Mohammadi est, aujourd’hui, devenue l’emblème de cette légion de l’ombre de la société iranienne prête à se sacrifier pour exister dans une société des plus conservatrices du monde arabe. Directrice adjointe du Centre des défenseurs des droits de l’homme, fondé par Shirin Ebadi, précédente femme prix Nobel de la Paix, Narges Mohammadi est enfermée à la funeste prison d’Evin à Téhéran, une des plus terribles du pays, après avoir été condamnée  pour diffusion de propagande. Propagande anti-régime, cela s’entend.

AFP
Le journaliste iranien Taghi Rahmani (au centre), le mari du militant iranien des droits de l’homme et lauréat du prix Nobel de la paix 2023 Narges Mohammadi, leur fils Ali (à droite) et le secrétaire général de l’ONG de Reporters sans frontières (RSF), Christophe Deloire (à gauche), arrivent pour une conférence de presse à Paris le 6 octobre 2023. (Photo par Thomas SAMSON / AFP)
Condamnée plusieurs fois par le régime des Mollahs
Sa médiatisation semblait gêner le pouvoir iranien, d’autant qu’elle a rejoint la liste annuelle de BBC des 100 femmes les plus influentes et les plus inspirantes de la planète. Arrêtée plus d’une dizaine de fois, la journaliste et activiste des droits humains Narges Mohammadi a été déjà condamnée 5 fois, mais elle a continué son combat.
Beaucoup pensaient que le régime pourrait s’affaiblir, voire rêvaient qu’il s’effondre, à la suite des nombreuses manifestations qui ont essaimé partout dans le pays après la mort d’Amini. On a cru à la disparition de la police des mœurs, ce qui ne fut absolument pas le cas. Le fait que l’Iran ait rejoint dernièrement les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), avec des pays comme les Emirats arabes unis, l’Egypte ou l’Arabie Saoudite, renforce le pays dans l’idée qu’il existe une alternative aux pays occidentaux, à ses valeurs, sa morale, aux démocraties libérales (et à sa défense des droits de l’homme).
C’est pour cela qu’il y a peu à espérer qu’on assiste rapidement à la libération de la nouvelle Prix Nobel de la Paix, qui reste un symbole, mais aussi et avant tout un trophée des Occidentaux, dont reconnaissons-le, Téhéran n’a vraiment cure. Et qu’elle se rende à Oslo pour le recevoir en mains propres relève de la pure illusion hélas.
Sébastien Boussois
Docteur en sciences politiques, chercheur monde arabe et géopolitique, enseignant en relations internationales, collaborateur scientifique du CECID (Université Libre de Bruxelles), du CNAM Paris (Equipe Sécurité Défense) et du Nordic Center for Conflict Transformation (NCCT Stockholm)
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Source: LPOST

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