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Qatargate : cueilli à l’heure du laitier, l’eurodéputé belge Marc Tarabella va passer la nuit en cellule
Après un long interrogatoire par les enquêteurs, l’eurodéputé belge, Marc Tarabella (photo, PS) va passer la nuit en cellule avant d’être présenté au juge d’instruction, Michel Claise ce samedi 11 février. Belga.Après le Parlement européen, le séisme du Qatargate s’étend désormais directement à la Belgique. Même si ce n’est pas une surprise, Marc Tarabella a été interpellé ce vendredi 10 février au matin et, à l’issue d’un long interrogatoire, il dormira cette nuit en cellule avant d’être présenté au juge Michel Claise en vue d’une probable inculpation. Mais rien n’est joué et l’eurodéputé bénéficie toujours de la présomption d’innocence. Mais ce nouveau développement dans le dossier n’est pas vraiment une surprise depuis la levée de l’immunuté parlementaire de Marc Tarabella. Il plombe encore un peu plus l’image du Parti socialiste.
Marc Tarabella a été sorti de son lit, ce matin, à six heures. Pas de ménagement particulier pour le parlementaire européen dont l’immunité avait été levée, à l’unanimité par ses pairs, il y a une semaine. Il a été traité comme un vulgaire délinquant, et c’est à l’heure du laitier que la police s’est présentée à son domicile. L’un des policiers venus l’interpeller aurait même osé une cruelle plaisanterie : « Vous disiez vouloir être entendu ? Eh bien nous voilà… »
Il a ensuite été emmené à la maison communale d’Anthisnes, dont il est bourgmestre et où son bureau et plusieurs autres locaux ont été perquisitionnés. Les enquêteurs ont ensuite fait ouvrir un coffre à son nom dans une agence bancaire de la région liégeoise avant qu’il ne soit transféré à Bruxelles où il a longuement été entendu par les enquêteurs, dans les locaux de la police judiciaire. L’interrogatoire a duré toute la journée, preuve à la fois du nombre de questions que la police avait à lui poser et de la combativité de celui qui se serait défendu, nous dit-on, pied à pied.
Tarabella dans le collimateur depuis longtemps
Mais si l’interpellation du député européen fera du bruit dans le landerneau belge et va durement secouer un parti socialiste qui se serait bien passé de ce rebondissement, il ne s’agit pas vraiment d’une surprise. « Depuis les premiers jours de l’enquête, il était dans le collimateur », nous confiait cet après-midi une source proche du dossier : « D’abord, nous avions des écoutes téléphoniques prouvant qu’en novembre 2022, lors du Hearing du ministre koweitien du travail, il avait agi comme s’il était aux ordres, Quelques minutes après un échange entre Pier-Antonio Panzeri (le maître d’œuvre de la centrale de corruption active autour du parlement) qui n’était pas présent et son lieutenant, Francesco Giorgi, qui, en sa qualité d’assistant parlementaire, était dans l’hémicycle, il avait posé une question visant à exonérer Doha de toute violation des droits des travailleurs en noyant le poisson. Or, les termes qu’il utilisait étaient, presque mot pour mot, ceux qui avaient été discutés quelques minutes auparavant par Panzeri. Du reste, Giorgi venait de dire à son patron qu’il allait intervenir. En le citant nommément… » Il est clair que ce n’était pas bon pour son matricule…»
Ensuite il avait été mis en cause par les deux principaux inculpés (toujours Panzeri et Giorgi, NDLR) lors de leur premières auditions. Et lorsque Panzeri avait bénéficié de son statut de « repenti », il avait confirmé les propos tenus lors de son audition du 10 décembre 2022, à savoir que Marc Tarabella était « le seul député à avoir accepté de l’argent pour plaider la cause du Qatar » et qu’il avait reçu « entre 120.000 et entre 140.000 euros » pour acheter son appui en faveur de ses clients Qatari.
Qu’il crie au complot politique ou affirme qu’il ne répondrait à aucune question? Non, il a joué la seule partition possible et il a perdu.
Possible inculpation de Marc Tarabella
Soulignons-le, depuis le premier jour, Marc Tarabella clamait son innocence et affirmait vouloir être entendu par la justice, ce qui explique le mot d’esprit d’un policier aux petites heures de ce vendredi. « Mais que vouliez-vous qu’il fasse d’autre ? », observe-t-on dans le milieu de l’enquête, « qu’il crie au complot politique ou affirme qu’il ne répondrait à aucune question? Non, il a joué la seule partition possible et il a perdu. Il faut dire que nous ne manquons pas d’éléments pour le mettre en cause ».
Depuis qu’il avait été perquisitionné dans la soirée du 9 décembre (en présence de la présidente du Parlement européen, revenue en urgence de Malte), les enquêteurs du juge d’instruction Michel Claise ont travaillé sur les supports informatiques et téléphoniques qui avaient été saisis ou copiés et sur certains documents qui avaient été trouvés à son domicile. Mais la levée de son immunité, la semaine dernière, a permis d’autres recherches avant qu’il ne soit cueilli au saut du lit ce matin.
Ayant été privé de liberté à six heures ce vendredi, Tarabella devrait être présenté au juge d’instruction dans les 24 heures de sa privation de liberté, soit avant six heures du matin ce samedi 11 février. Que fera le juge ? Pour l’une de nos sources proches de l’enquête, « il est impossible de préjuger de la décision du magistrat instructeur qui est seul maître à bord, mais le plus logique serait qu’il soit inculpé, ne serait-ce que sur base de sa mise en cause par Panzeri. Se posera alors la question de son éventuelle mise en cause. Celle-ci peut être décidée sur base de la gravité des faits, mais aussi du risque qu’il cherche à se soustraire à la justice, ce qui paraît très peu probable, mais aussi qu’il se concerte avec d’autres suspects qui sont toujours en liberté, ce qui est une possibilité non nulle. Mais une fois de plus, c’est le juge qui décide… »
On apprenait également aujourd’hui que le domicile belge de l’eurodéputé Andrea Cozzolino (qui avait également vu son immunité suspendue la semaine dernière) avait été perquisitionné mais que, n’étant pas en Belgique, il n’avait pas pu être entendu. Mais il aurait été arrêté à Naples. Enfin, les bureaux des deux élus au Parlement ont été placés sous scellés en prévision de futures perquisitions qui pourraient se dérouler dès ce week-end.
Hugues Krasner
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Source: LPOST
