Oliver Vandecasteele, victime collatérale de l’Iran et… de la Belgique
La photo d’illustration montre l’installation d’une grande bannière avec un portrait d’Olivier Vandecasteele, travailleur d’une ONG belge, à Tournai, le jeudi 12 janvier 2023. BELGAArrêté le 24 février 2022 en Iran, le chercheur et travailleur humanitaire belge avait été condamné le 14 décembre dernier à 28 ans de prison. Ayant travaillé depuis plus de six ans pour un certain nombre d’organisations internationales, il croupit à l’isolement complet depuis plus de dix mois au fond d’une cellule, sans possibilité de s’adresser à ses avocats, sans vêtements adéquats pour l’hiver et, surtout, en très mauvaise santé. Le traité d’échange de prisonniers entre les deux pays susceptible de permettre à Olivier Vandecasteele de revenir en Belgique est bloqué par la Cour constitutionnelle. La ministre des Affaires étrangères belge, Hadja Lahbib (MR) appelle à la discrétion et à la prudence.
Rien à ce jour n’explique l’emprisonnement arbitraire d’Olivier Vandecasteele par Téhéran. Le contexte des manifestations après la mort en détention de la jeune étudiante de 22 ans Mahsa Amini et le vent de révolte contre le régime ont raidi un peu plus encore le régime des mollahs en Iran. Il se pourrait bien que dans un contexte accru de paranoïa, le régime voit des espions et des agents de l’étranger un peu partout, plus encore qu’en temps normal dans tous les régimes autoritaires.
C’est souvent en temps de guerre ou de déstabilisation d’un pouvoir ou encore lors de la prise de pouvoir par des groupes militaires, le lot de nombre d’humanitaires qui se retrouvent alors des victimes collatérales de régimes armés ou au cœur de violents conflits. Mais le Belge, originaire de la Wallonie picarde, pourrait surtout être une « monnaie d’échange » pour le régime iranien.
Un traité d’échange de prisonniers controversé
En effet, le 4 janvier dernier, les services diplomatiques belges en Iran ont pu rencontrer le détenu dans sa prison. Ayant entamé une grève de la faim et très affaibli, il a pu tout de même expliquer qu’on l’avait forcé à participer à ce qu’il considère comme une pure mise en scène de son procès et pester contre son pays. En effet, depuis des mois, les soutiens de Vandecasteele militent pour que la Belgique prenne ses responsabilités depuis que la Cour constitutionnelle a annulé l’article 5 du traité de transfèrement entre les deux pays. Il permet aux personnes condamnées dans chacun des deux pays de purger leur peine dans leur pays d’appartenance.
La Belgique détient le diplomate iranien Assadollah Assadi, qui avait été condamné en 2021 à une peine de 20 ans de prison pour une tentative d’attentat terroriste contre l’opposition iranienne à Villejuif, en région parisienne. Le cas d’Olivier Vandecasteele est probablement tombé au bon moment pour Téhéran. L’ONU a plusieurs fois alerté sur le traitement inhumain imposé au prisonnier belge en Iran.
Discrétion et prudence
Son entourage est désespéré depuis l’annulation du traité par la Belgique et fait pression sur les autorités. Une large partie de la société civile tente de se mobiliser, à travers des tribunes dans la presse et des pétitions. Mais à ce jour, même si le Parlement et le Gouvernement fédéral ont approuvé le retour du traité de transfèrement, la Cour Constitutionnelle reste inflexible.
Selon la famille et les proches, la décision de la cour s’expliquerait davantage par la peur que le diplomate iranien soit relâché en Iran et puisse re commettre de nouveaux attentats sur le sol européen. La ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib appelle « à la plus grande discrétion » et à « la prudence » dans le dossier.
Sébastien BOUSSOIS
Docteur en sciences politiques, chercheur Moyen-Orient relations euro-arabes/ terrorisme et radicalisation, enseignant en relations internationales, collaborateur scientifique du CECID (Université Libre de Bruxelles), de l’OMAN (UQAM Montréal) et du NORDIC CENTER FOR CONFLICT TRANSFORMATION (NCCT Stockholm)
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Source: LPOST
