Une première en France : des enfants vont à l’école dans une séniorie aux côtés des résidents
Une école dans une commune du Nord-Pas-de-Calais permettra des échanges intergénérationnels fructueux. BELGAPour leur rentrée scolaire, une trentaine d’enfants de 3 à 6 ans ont leur école aménagée dans un Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) où ils côtoient les résidents. L’expérience est menée dans une petite commune du Nord-Pas-de-Calais et visiblement, toutes les parties n’en voient que des avantages. « On veut arriver à un objectif de partage, de convivialité, de rencontre. Imaginez un anniversaire entre Marguerite, 96 ans, et Thomas, 3 ans », commente l’inspectrice régionale de l’Education nationale. Pour un sociologue du vieillissement, « ce genre d’initiatives intergénérationnelles devrait se multiplier, tant elles combinent des intérêts économiques et moraux ». Reportage.
Le jour se lève à peine sur Barlin, commune de près de 7.800 habitants dans le Pas-de-Calais, à une grosse vingtaine de kilomètres à l’ouest de Lens. En ce petit matin, en ce début de deuxième semaine de l’année nouvelle, pères et/ou mères accompagnent trente-trois enfants âgés de 3 à 6 ans à l’école…. Façon de parler et d’écrire puisque l’école maternelle Maryse-Bastié se trouve, depuis ce 1er janvier 2023, dans un « espace intergénérationnel » dont le but est affiché juste à côté de la porte d’entrée : « bien grandir, bien vieillir ».
Donner des racines et des ailes aux enfants
L’école, et c’est une première en France, avec ses deux classes est installée dans les locaux de la résidence pour personnes âgées Les Charmilles, un Ehpad (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes) qui compte 66 pensionnaires, dont 12 en unité Alzheimer, et 24 seniors « en bonne forme ».
Maire (PS, Parti socialiste) de la ville depuis janvier 2018, Julien Dagbert, 34 ans, aime répéter : « On ne peut donner que deux choses à ses enfants : des racines et des ailes ». Et le premier jour de la rentrée scolaire de janvier 2023, il a commenté : « Un grand moment d’émotion et de fierté pour tous les artisans de ce beau projet « Bien vieillir à Barlin », le groupe Ahnac [NDLR : Association Hospitalière Nord Artois Clinique], les services de la ville, les enseignantes, l’éducation nationale, l’adjointe à l’enseignement et les élus. L’aventure commence… et déjà les projets se mettent en place ! »
A la satisfaction du maire de Barlin qui reconnaît chez des parents d’élèves « un certain scepticisme quand le projet a été présenté », répond celle de l’inspectrice régionale de l’Education nationale : « On veut arriver à un objectif de partage, de convivialité, de rencontre. Imaginez un anniversaire entre Marguerite, 96 ans, et Thomas, 3 ans ». Et d’ajouter : « Ces échanges pourraient passer, par exemple, par des ateliers d’arts plastiques communs… On peut aller très loin dans les activités à une seule condition : que tout le monde soit d’accord ».
Ouverture plus tôt que prévu
Les deux classes de l’école maternelle sont installées dans l’ancien dortoir de l’Ehpad et ont été ouvertes deux mois avant la date prévue à l’origine du projet. « L’originalité du projet a fait qu’on a pu aller plus vite que prévu », commente le maire. Une mère qui a deux enfants dans l’école : « J’étais sceptique au début, j’avais peur que mes enfants soient perdus mais, finalement, ils étaient très contents et excités »… Une des deux enseignantes : « Ça ne change rien à notre organisation. Tant que ça plaît à mes enfants, c’est parfait ». Une résidente des Charmilles, 90 ans : « C’est une bonne chose, ça va mettre de la vie ici ».
Un sociologue du vieillissement commente l’expérience : « Comment se fait-il que, dans une société qui se prétend inclusive, ces initiatives demeurent exceptionnelles ? Ce genre d’initiatives intergénérationnelles devrait se multiplier, tant elles combinent des intérêts économiques et moraux. Et n’allez pas croire que seules les personnes âgées tirent des bénéfices de ces moments d’échange : il y a un éveil pour les enfants autant qu’une stimulation pour les seniors ». Pour une des institutrices, les avantages de cette cohabitation sont nombreux. « Les enfants pourront prendre leur déjeuner à la cantine avec les résidents et les résidentes. Cela va révolutionner nos journées de classe. Jusqu’alors, nous devions conduire les enfants en bus jusqu’au réfectoire du collège de la ville… », dit-elle.
La pédagogie pour lever les inquiétudes
Un point d’interrogation est vite apparu, quand l’idée du projet a été lancée : l’écart d’âge entre les résidents et les enfants. La directrice de l’Ehpad : « Dans l’établissement, les âges vont de 65 à 96 ans. Il a fallu faire preuve de pédagogie auprès des plus anciens, qui pouvaient ressentir le débarquement des enfants comme une atteinte à leur espace privé. Aucun pensionnaire de l’Ehpad ne sera brusqué dans son intimité ». Complément d’information du maire : « La plupart des résidents et des résidentes ont très bien réagi même s’il y avait quelques petits doutes. Ils se réjouissent de pouvoir cohabiter avec les élèves… C’est une belle aventure qui va prendre son temps ».
Et déjà, à la mairie de Barlin, on voit plus loin : sont envisagées une crèche et des classes d’école élémentaire… Julien Dagbert, le premier édile de la ville, avoue sa difficulté à taire son émotion d’avoir réalisé « ce projet qui est, d’abord et avant tout, un projet humain ! » et une pensée particulière pour sa « grand-mère qui a vécu dans cette résidence et qui aurait, à coup sûr, adoré ce projet ! ».
Serge BRESSAN (en France)
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Source: LPOST
